Acquisition de services de traduction par Innovation, Sciences et Développement économique Canada Nouveau

Février 2023

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La plainte

1. Le 18 août 2022, le Bureau de l’ombudsman de l’approvisionnement (BOA) a reçu une plainte écrite d’un fournisseur (le plaignant) concernant des contrats attribués par Innovation, Science et Développement économique Canada (ISDE). Les contrats portent sur des services de traduction de l’anglais vers le français et ont été attribués à titre de commandes subséquentes dans le cadre de 2 offres à commandes (OC) découlant de la demande d’offre à commandes (DOC) no. ISDE200187. Les contrats ont été attribués le 3 août 2022 et le 4 août 2022, et sont évalués à 8 699,86 $ et 8 699,99 $ (taxes incluses) respectivement.

2. Le plaignant a communiqué avec le BOA en indiquant qu’il croyait que le processus de commande subséquente contrevenait aux modalités des OC, car ISDE a soumis le plaignant à un deuxième processus d’évaluation arbitraire et non divulgué, et que la commande subséquente ne contenait pas tous les détails pertinents nécessaires pour traiter la demande de services (par exemple, le document à traduire, la date d’échéance du produit livrable, etc.) conformément aux modalités de l’OC.

3. La plainte a soulevé les questions suivantes :

4. Le 24 août 2022, le BOA a confirmé que la plainte répondait aux exigences du Règlement concernant l’ombudsman de l’approvisionnement (le Règlement), et la plainte a été considérée comme déposée.

Mandat

5. L’examen de la plainte a été mené en vertu de l’alinéa 22.1(3)b) de la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et des articles 7 à 14 du Règlement.

6. Conformément au paragraphe 9(2) du Règlement, l’ombudsman de l’approvisionnement a demandé à ISDE de lui fournir tous les documents ministériels liés au processus d’approvisionnement et à l’attribution du marché en question ainsi que les politiques et les lignes directrices d’ISDE en matière d’approvisionnement qui étaient en vigueur au moment de la demande de soumissions. L’ombudsman de l’approvisionnement a pour sa part demandé au plaignant de lui fournir les renseignements supplémentaires qui n’ont pas déjà été fournis dans le cadre de la plainte.

7. Les constatations du présent rapport sont fondées sur les documents fournis par le plaignant et ISDE, ainsi que sur des renseignements pertinents accessibles au public. Elles pourraient donc être faussées si le plaignant ou ISDE a omis de divulguer des documents ou des renseignements d’intérêt.

Contexte

8. Les offres à commande sont une méthode d’approvisionnement établie pour simplifier l’acquisition de biens et de services fréquemment achetés par les ministères et les organismes fédéraux où l’on ne connaît pas la demande à l’avance. L’utilisation des offres à commandes vise à :

9. Une OC est une offre continue d’un fournisseur à l’intention du gouvernement qui permet aux ministères et aux organismes de se procurer des biens et des services au besoin, de temps à autre durant la durée de l’OC, par l’entremise d’un processus des commandes subséquentes, qui comprend les conditions et les prix de l’OC. On fait généralement appel à des OC lorsqu’un ministère prévoit acquérir des biens ou des services, mais n’a pas encore déterminé le moment, l’endroit et la quantité nécessaire pour une période donnée.

10. Les OC conviennent le mieux aux biens ou aux services qu’on peut clairement définir pour permettre aux soumissionnaires d’offrir des prix fermes. Les OC ne sont pas des contrats, mais plutôt des ententes de prix établis par un processus d’appel d’offres, soit par soumission concurrentielle, soit par négociation par le biais d’une demande d’offre à commandes (DOC), qui est soumise aux politiques et aux procédures normales en matière de contrats. En plus des informations habituelles contenues dans un document de demande de soumissions concurrentielle, comme les instructions pour la préparation des offres et les critères d’évaluation clairs, la DOC (et l’OC qui en découle) doit inclure les clauses du contrat subséquent applicable aux commandes subséquentes et, si plus d’une OC est émise, les méthodes de classement et la ou les procédures de commande subséquente.

11. Dans le cadre d’une DOC, les soumissionnaires présentent des propositions qui contiennent les prix des biens ou des services pour la durée de l’OC et sont évaluées selon les critères établis. Lorsqu’une OC est établie avec un soumissionnaire retenu (appelé détenteur d’une convention d’offre à commandes (COC)), le titulaire de COC offre de fournir certains biens ou services selon des modalités, des conditions et des prix précis pendant une période déterminée. L’OC constitue l’offre du titulaire de COC. Lorsque des biens et des services offerts par une OC sont demandés, les ministères passent une commande subséquente ce qui constitue l’acceptation de l’offre du titulaire de COC. La combinaison de l’offre du titulaire de COC et de l’acceptation de cette offre par le ministère constitue un contrat contraignant. Les ministères ne doivent pas lancer d’appel d’offres secondaire à l’étape de la commande subséquente, à moins que les modalités de l’OC ne le prévoient expressément.

12. Une ou plusieurs OC peuvent être émises dans le cadre d’un processus de DOC. Comme indiqué ci-dessus, lorsque plusieurs OC sont émises, des méthodes de classement claires et des procédures de commandes subséquentes doivent être décrites dans la DOC, afin que les soumissionnaires en prennent connaissance dans la préparation de leur offre. Les 2 modèles de méthode de classement les plus couramment utilisés sont le principe du droit de premier refus et le principe proportionnel. Dans le cas du droit de premier refus, le ministère doit d’abord communiquer avec le titulaire de COC le mieux classé. Si le titulaire de COC ayant obtenu la cote la plus élevée est en mesure de répondre à la demande, une commande subséquente (c’est-à-dire un contrat) à son offre à commandes est passée. Si ce titulaire n’est pas en mesure de répondre à la demande, le ministère contactera le titulaire de COC classé au rang suivant et ainsi de suite. Dans le cas du principe proportionnel, le titulaire de COC le mieux classé obtient la plus grande partie prédéterminée du travail. Le titulaire de COC classé au deuxième rang obtient la deuxième plus grande partie prédéterminée du travail et ainsi de suite. Si des commandes subséquentes sont émises dans le cadre d’offres à commandes selon l’approche du principe proportionnel, la répartition doit être indiquée dans la DOC (par exemple, 50 % au titulaire de COC le mieux classé, 30 % au titulaire de COC classé au deuxième rang et 20 % au titulaire de COC classé au troisième rang). On doit décrire dans la DOC cette répartition préétablie du volume de travail pour que les soumissionnaires intéressés en prennent connaissance dans la préparation de leur offre.

13. Dans certains cas, le classement ne peut être établi. Cela se produit, par exemple, lorsque les prix sont demandés pour une gamme complète d’articles contenus dans un catalogue et que les fournisseurs ne proposent pas tous cette gamme complète. Dans le cas où les titulaires de COC ne peuvent être classés, le responsable autorisé à passer les commandes subséquentes peut choisir l’OC à laquelle on fera appel. Les commandes subséquentes passées dans le cadre de ces OC sont non concurrentielles et seuls les pouvoirs de passation de commandes subséquentes non concurrentielles peuvent être exercés.

Chronologie des événements

14. Le 16 juillet 2021, ISDE a affiché la DOC no. ISDE200187 sur le site du service électronique d’appels d’offres du gouvernement du Canada, achatsetventes.gc.ca, pour des services de traduction, de révision (y compris la révision comparative), de correction d’épreuves et de rédaction de discours. Le processus de DOC a abouti à la création de 31 OC, comme suit :

Types de services requis et nombres d’offres a commandes émises
Type de service Nombre d’offres à commandes émises
Traduction de l’anglais vers le français 11
Traduction du français vers l’anglais 7
Révision française 4
Révision anglaise 3
Correction d’épreuves en français 4
Correction d’épreuves en anglais 2
Total 31

15. Le 31 mai 2022, le plaignant a reçu une des 11 OC pour la traduction de l’anglais vers le français (OC no. 800099011) pour la période du 1er juin 2022 au 31 mars 2023. L’OC comprenait également quatre périodes d’option d’un an. La valeur de l’OC était de 1 000 000,00 $, taxes en sus.

16. Le 27 juin 2022 ou aux alentours de cette date, un client interne d’ISDE (le client d’ISDE) a communiqué avec 3 des 11 titulaires de COC de traduction de l’anglais vers le français, dont un était le plaignant, afin de lancer une demande de propositions pour des services de traduction de l’anglais vers le français « au fur et à mesure des besoins » pour le reste de la période initiale de l’OC. La demande contenait un énoncé des travaux et exigeait que le titulaire de COC fournisse les éléments suivants avant le 8 juillet 2022 :

17. Le 28 juin 2022, le plaignant et les 2 autres titulaires de COC ont envoyé des courriels au client d’ISDE pour demander pourquoi des échantillons de traductions antérieures étaient nécessaires puisqu’une évaluation avait déjà été effectuée dans le cadre du processus de DOC. Le client d’ISDE a répondu que des échantillons de travaux antérieurs étaient nécessaires, car aucun des 3 titulaires de COC n’avait fait affaire auparavant avec le service du client d’ISDE.

18. Plus tard le même jour, le plaignant a confirmé par courriel au client d’ISDE son intérêt pour la commande subséquente, mais a demandé des précisions quant aux renseignements requis dans la proposition, car il avait déjà fourni une proposition avec des échantillons et un curriculum vitae dans le cadre du processus de DOC. Le client d’ISDE a répondu que le plaignant pouvait simplement soumettre à nouveau les échantillons qu’il avait envoyés dans le cadre du processus de DOC et une lettre signée confirmant sa capacité à traduire un nombre total de mots allant jusqu’à 32 079 mots d’ici le 31 mars 2023, aux tarifs contenus dans l’OC.

19. Le 29 juin 2022, l’un des 2 autres titulaires de COC a soumis sa proposition au client d’ISDE, accompagnée de 3 échantillons de traduction et de curriculum vitae.

20. Le 30 juin 2022, le plaignant a confirmé une nouvelle fois par courriel au client d’ISDE son intérêt pour une commande subséquente à son OC. Le plaignant a déclaré que, bien qu’il pourrait traduire 32 079 mots d’ici le 31 mars 2023, il ne pouvait pas s’engager, par écrit, à accepter les demandes sans connaître le besoin réel et les délais associés. Le plaignant a également réaffirmé qu’il considérait avoir démontré, par le biais du processus officiel de DOC, sa capacité à fournir les services de traduction requis. Le plaignant a confirmé ses tarifs, joint 3 échantillons de travaux de traduction antérieurs et confirmé qu’aucune autre ressource ne serait utilisée pour effectuer la traduction.

21. Plus tard le même jour, le plaignant a envoyé un courriel à l’autorité contractante (AC) d’ISDE pour demander des précisions sur la procédure de commande subséquente. L’AC a répondu :

« [c]e n’est pas une demande générale typique d’un client, mais il se peut que ce client veuille simplement confirmer votre capacité à fournir des traductions de grande qualité pour les ministères. Bien que vous ayez déjà été évalué, je ne vois pas de problème à vous soumettre à leur demande. Cela peut être dû au manque d’expérience avec le ministère ou au fait que leur secteur n’ait pas fait appel à vos services auparavant.

La plupart des demandes porteront simplement sur un devis qui reflète le numéro de l’offre à commandes ainsi que les prix approuvés décrits dans l’OC. Bien que notre équipe d’approvisionnement gère les commandes subséquentes émises dans le cadre de l’offre à commandes et en rende compte, tous les membres d’ISDE de la région de la capitale nationale sont en mesure d’émettre des commandes subséquentes dans le cadre de l’offre à commandes. »

22. Le 4 juillet 2022, l’autre titulaire de la COC a soumis son offre de service au client d’ISDE, accompagnée de 3 échantillons de traductions et de curriculum vitae des traducteurs recommandés.

23. Le 18 juillet 2022, le client d’ISDE a remercié le Plaignant pour l’envoi de son offre de service et d’échantillons de traductions et lui a fait savoir qu’à la suite d’une vérification effectuée par son équipe, il n’y aurait pas de commande subséquente. Plus tard dans la journée, le client d’ISDE a informé les 2 autres titulaires de COC que leurs propositions et échantillons avaient été passés en revue et que leurs offres de service étaient acceptées.

24. Le 19 juillet 2022, le Plaignant a envoyé un courriel au chargé de projet (CP) d’ISDE dont le nom figure dans l’OC, afin d’obtenir plus d’information sur le processus interne de commande subséquente d’ISDE, car on ne lui avait jamais demandé dans le passé, de la part d’autres ministères, de soumettre à nouveau une proposition, de démontrer ses compétences et de participer à une commande subséquente sans savoir quels étaient les exigences en matière de traduction et les délais connexes.

25. Le 20 juillet 2022, l’AC a répondu au Plaignant qu’elle était le principal point de contact pour les discussions relatives à l’OC et qu’elle serait heureuse de fournir de plus amples explications sur l’OC et les processus associés.

26. Le 21 juillet 2022, le Plaignant a répondu à l’AC et a encore une fois remis en question le processus de commande subséquente, car il était différent de celui qu’il avait l’habitude de suivre avec les autres ministères fédéraux. Le Plaignant a plus spécifiquement contesté le processus d’évaluation secondaire et le fait que la commande subséquente ne portait pas sur la traduction de documents spécifiques avec des échéances précises, mais plutôt sur une demande générale de prestation de services sur une période prolongée.

27. Le 25 juillet 2022, l’AC a répondu au Plaignant que « si un gestionnaire/client décide de vous demander des exemples dans le cadre de son appel d’offres, il peut le faire. Il ne s’agit pas d’une évaluation secondaire, mais plutôt d’une demande d’un Secteur de vérifier un travail antérieur. Aucun critère n’est utilisé, il s’agit simplement d’une demande d’un employé de passer en revue un travail antérieur. » L’Autorité contractante a poursuivi en indiquant que les commandes subséquentes peuvent être faites « sur demande », mais que les clients d’ISDE peuvent également demander des commandes subséquentes pour des travaux bien précis (c’est-à-dire un document avec un nombre de mots spécifiques, avec un échéancier prédéterminé).

28. Plus tard le même jour, le Plaignant a demandé à l’AC pourquoi un employé voudrait examiner son travail antérieur si ce n’est à des fins d’évaluation et de sélection.

29. Le 26 juillet 2022, l’AC a répondu au Plaignant en indiquant que le client d’ISDE avait peut-être voulu « revoir certains de vos travaux antérieurs. Je ne saurais dire pourquoi exactement il a demandé cette information. Si vous pouvez me fournir le nom de la personne en question, je peux la contacter. »

30. Plus tard le même jour, le Plaignant a répondu à l’AC qu’il considérait le processus de sélection comme un « processus non concurrentiel, subjectif, discrétionnaire et discriminatoire » et a remis en question la transparence et l’équité dudit processus. Le Plaignant a réitéré sa question quant à l’acceptabilité du processus utilisé.

31. Le 2 août 2022, le CP a répondu au Plaignant en lui indiquant qu’il avait demandé à un cadre supérieur d’étudier le dossier et de tenter de répondre aux questions soulevées, et lui a également demandé les coordonnées du client d’ISDE. Le CP a supposé que le client d’ISDE avait décidé de ne pas faire de commande subséquente parce que le document à traduire n’était peut-être pas complet ou devait être mis à jour.

32. Le 3 août 2022, le Plaignant a fourni les coordonnées du client d’ISDE. Le Plaignant a également répété au CP que, puisque la commande subséquente ne portait pas sur un document, mais plutôt sur une période, la décision de mettre un terme à la démarche ne pouvait être attribuée à la mise à jour ou au caractère incomplet du document.

33. Plus tard ce même jour, le client d’ISDE a attribué la commande subséquente no 3519408 à un titulaire de COC pour la période du 5 août 2022 au 31 mars 2023. Cette commande subséquente s’élevait à 8 699,86 $ (taxes comprises) pour des services de traduction de l’anglais vers le français, à effectuer au besoin.

34. Le 4 août 2022, le client d’ISDE a attribué la commande subséquente n° 3519414 à l’autre titulaire de COC pour la période du 8 août 2022 au 31 mars 2023. Cette commande subséquente s’élevait quant à elle à 8 699,99 $ (taxes comprises) pour des services de traduction de l’anglais vers le français, à effectuer au besoin.

35. Le 23 août 2022, le client d’ISDE a confirmé à l’AC qu’il avait contacté 3 titulaires de COC et demandé des échantillons de 3 traductions en plus d’offres de services. Les 3 propositions ont été passées en revue, et des commandes subséquentes ont été accordées aux 2 titulaires de COC retenus.

36. Le 6 septembre 2022, le BOA a informé ISDE et le Plaignant du début de l’évaluation de la plainte.

Analyse des questions et constatations

Question 1 – Innovation, Science et Développement économique Canada a-t-il utilisé inadéquatement la méthode d’approvisionnement par offre à commandes?

37. À ce propos, le Plaignant affirme ce qui suit :

« Je considère que ce processus de commande subséquente contrevient à l’offre à commandes signée pour les raisons suivantes:

38. Voici la réponse du Ministère au BOA [traduction libre] :

« […]

  1. Cette liste de fournisseurs est disponible sur l’intranet d’ISDE, et les clients (secteurs) peuvent la consulter avant de communiquer avec un responsable des achats d’ISDE pour instaurer un contrat.
  2. Dans le cas présent, [ISDE] a contacté trois entreprises de la liste pour leur demander des échantillons de leur travail dans l’intention d’attribuer un marché de services de traduction d’une valeur totale de 17 400 $ (2 × 8 700 $).
  3. Rien dans l’offre à commandes ne l’interdit, et on comprend qu’un secteur des communications souhaite examiner le produit avant de conclure un contrat, vu la nature du travail.
  4. Finalement, [ISDE] a choisi deux des trois entreprises […]. La troisième entreprise, le plaignant, n’a pas été retenue à la suite de l’examen des échantillons de travail.
  5. ISDE a suivi toutes les directives pertinentes de la passation de marchés, les mesures prises […] étaient également admises et n’allaient pas à l’encontre d’une quelconque réglementation ou clause liée aux marchés.
  6. Dans ce cas particulier, il est probable que le fournisseur n’était pas familier avec le processus gouvernemental entourant les marchés publics et les offres à commandes.
  7. Avant qu’ISDE puisse répondre au plaignant en lui réitérant le respect des règles sur les marchés et en lui expliquant les processus courants liés aux commandes subséquentes à une offre à commandes, la plainte officielle a été déposée auprès du BOA. »

39. La Directive sur la gestion de l’approvisionnement (DGA) du Conseil du Trésor est en vigueur depuis le 13 mai 2022 et était applicable au moment où les 2 commandes subséquentes ont été émises. La section 4.5.3 du DGA exige des autorités contractantes qu'elles simplifient les documents d'appel d'offres dans la mesure du possible afin de favoriser des processus rationalisés.

40. Le paragraphe 1.5.5 b. du Guide des approvisionnements indique que « … Le Guide des approvisionnements peut servir d’outil de référence pour… de tels approvisionnements internes ». Ce Guide contient des politiques et des procédures destinées principalement aux agents de négociation des contrats de Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC). De nombreux ministères fédéraux se reposent sur le Guide des approvisionnements pour obtenir des conseils supplémentaires, étant donné que SPAC s’occupe des achats au nom d’autres organismes du gouvernement du Canada. L’article 3.40 du Guide des approvisionnements donne des indications sur la méthode d’approvisionnement de l’offre à commandes :

[…]

  1. L’ensemble des politiques, des règlements et des procédures du gouvernement en ce qui a trait à l’attribution des contrats, y compris les procédures prévues dans les accords commerciaux, s’appliquent à l’offre à commandes comme méthode d’approvisionnement.

[…]

  1. L’offre à commandes comme méthode d’approvisionnement ne peut pas être utilisée lorsque :
    • […]
      1. l’intention est de demander des soumissions chaque fois qu’on a besoin de biens ou de services. Dans ces cas, une autre méthode d’approvisionnement, par exemple l’arrangement en matière d’approvisionnement, devrait être envisagé.

41. En outre, l’alinéa b du paragraphe 7.10.1 du Guide des approvisionnements de SPAC indique ce qui suit :

« Les commandes subséquentes doivent être passées selon les procédures énoncées dans l’offre à commandes et, dans le cas d’offres à commandes multiples, conformément à la méthode de commande subséquente décrite dans toutes les offres à commande citées en référence. […] »

42. Étant donné qu’une évaluation a lieu dans le cadre du processus de la DOC, les soumissionnaires qui sont jugés conformes reçoivent une offre à commandes. Comme il est indiqué précédemment, si un bien ou un service donné est requis, le ministère doit suivre les procédures de commande subséquente contenues dans l’offre à commandes pour attribuer une commande subséquente.

43. Une DOC et l’offre à commandes qui en découle doivent comprendre une ou plusieurs procédures claires de commande subséquente, y compris la méthode de répartition du travail entre diverses offres à commandes.

44. Les 3 offres à commandes en question ne contenaient aucune procédure de commande subséquente ou aucune méthode de répartition du travail. La DOC était assortie d’une exigence d’autorisation de travail dans la partie 4 – Procédures d’évaluation et méthode de sélection de la DOC :

« 4.7 Autorisation d’entreprendre des travaux

Les travaux faisant l’objet de la présente convention d’offre à commandes seront assujettis au processus d’autorisation suivant :

  1. Le responsable du projet fournira à l’entrepreneur une description des travaux à exécuter en vertu de l’offre à commandes qui soit suffisamment détaillée pour lui permettre d’établir un prix ferme pour les travaux à effectuer.
  2. Les entrepreneurs choisis devront présenter au responsable du projet un plan de travail sommaire, un calendrier de travail et un prix ferme avec détails à l’appui ou autre méthode de base de paiement, selon la nature du projet.
  3. Les affectations seront à prix ferme. Toutefois, si les besoins ou les travaux ne sont pas clairement énoncés, le responsable du projet peut autoriser préalablement le paiement d’un tarif quotidien plutôt que d’un prix ferme.
  4. [l]e plan de travail, le calendrier de travail et le prix ferme peuvent faire l’objet de négociation entre l’entrepreneur et le responsable de projet.
  5. L’autorisation d’entreprendre des travaux sera accordée sur émission d’une commande subséquente à une offre à commandes dûment signée par l’autorité contractante et le responsable de projet. »

45. En ce qui concerne le contenu de la commande subséquente, la section 4 de l’annexe C de l’OC – Énoncé des travaux – stipule ce qui suit :

« 4. Services/Définitions

[…]

La commande subséquente doit contenir tous les détails pertinents au traitement de la demande de service (par exemple, le nom du responsable de la commande subséquente ou de la ressource technique, la date de retour, le nombre de mots ou l’estimation des heures, la nature du texte, ou le type de service). Elle doit également indiquer l’adresse à laquelle le texte doit être retourné. Le titulaire de l’organisme de service spécial (OSS) doit faire de son mieux pour traiter tous les documents dans les délais convenus. »

46. De plus amples détails se trouvent dans la section 7 de l’annexe C – Énoncé des travaux des OC, qui stipule ce qui suit :

« 7. Assistance client

Pendant la durée de l’offre à commandes, le chargé du projet d’ISDE fournira au titulaire de l’offre à commande les éléments suivants :

47. Ni la DOC ni les OC ne contenaient de classement ni de répartition des tâches, comme le droit de premier refus ou les méthodologies proportionnelles. Alors que la DOC contenait une exigence d’autorisation de travail, celle-ci n’a pas été incluse dans les OC résultantes.

48. Selon le Guide des approvisionnements de SPAC, les OC « ne peuvent être utilisées lorsqu’il s’agit de lancer un appel d’offres chaque fois que des biens ou des services sont requis ».

Constatation – Question 1

49. ISDE a utilisé la méthode d’approvisionnement par offre à commandes de manière incorrecte, car elle :

  1. A émis des OC qui ne contenaient pas de procédures de commandes subséquentes ou de méthode de répartition des travaux;
  2. a sollicité simultanément des propositions auprès de 3 détenteurs d’OSS et a comparé ces propositions, ce qui constitue un deuxième processus concurrentiel qui échappe aux conditions de l’OSS; et
  3. a émis des commandes subséquentes « générales » qui ne portaient pas sur des exigences de travail définies, mais plutôt sur des exigences futures, ce qui fait que les commandes subséquentes agissent comme des offres à commandes secondaires.

Question 2 – Innovation, Science et Développement économique Canada a-t-il mené un processus d’acquisition concurrentiel en utilisant des critères non divulgués?

50. À ce propos, le Plaignant affirme ce qui suit :

« […] Je considère avoir été lésée par ce processus, pour les raisons suivantes :

51. La réponse du Ministère au BOA était la suivante [traduction libre] :

« […]

  1. Cette liste de fournisseurs est disponible sur l’intranet d’ISDE, et les clients (secteurs) peuvent la consulter avant de communiquer avec un responsable des achats d’ISDE pour instaurer un contrat.
  2. Dans le cas présent, [ISDE] a contacté trois entreprises de la liste pour leur demander des échantillons de leur travail dans l’intention d’attribuer un marché de services de traduction d’une valeur totale de 17 400 $ (2 × 8 700 $).
  3. Rien dans l’offre à commandes ne l’interdit, et on comprend que [ISDE] souhaite examiner le produit avant de conclure un contrat, vu la nature du travail.
  4. Finalement, [ISDE] a choisi deux des trois entreprises […]. La troisième entreprise, le plaignant, n’a pas été retenue à la suite de l’examen des échantillons de travail.
  5. ISDE a suivi toutes les directives pertinentes de la passation de marchés, les mesures prises par [ISDE] étaient également admises et n’allaient pas à l’encontre d’une quelconque réglementation ou clause liée aux marchés.
  6. Dans ce cas particulier, il est probable que le fournisseur n’était pas familier avec le processus gouvernemental entourant les marchés publics et les offres à commandes.
  7. Avant qu’ISDE puisse répondre au plaignant en lui réitérant le respect des règles sur les marchés et en lui expliquant les processus courants liés aux commandes subséquentes à une offre à commandes, la plainte officielle a été déposée auprès du BOA. »

52. Le Dictionary of Canadian Law définit concours/compétition comme « un événement auquel des participants prennent part pour comparer leurs compétences ou aptitudes ».

53. L’article 4.3.1 de la Directive sur la gestion de l’approvisionnement stipule que « [l]es autorités contractantes ont les responsabilités […] exécuter la fonction d’approvisionnement au nom du ministère ou de l’organisme et établir des contrats et des ententes contractuelles fondés sur des principes solides en matière d’approvisionnement, notamment l’équité, l’ouverture et la transparence, afin d’obtenir l’optimisation des ressources »

54. L’article 4.35 du Guide des indique que « [t]ous les critères d'évaluation, ainsi que leur importance et leur pondération relatives, doivent être énoncés clairement dans le document de demandes de soumissions ».

55. L’alinéa a) de l’article 4.40 du Guide des approvisionnements stipule que « [l]e processus d'évaluation et la méthode de sélection (c’est-à-dire prix le plus bas, le meilleur rapport qualité-prix, etc.) doivent être clairement décrits dans les documents de demandes de soumissions ».

Analyse – Question 2

56. Le client d’ISDE a sélectionné et sollicité 3 des 11 titulaires de COC pour des services de traduction de l’anglais au français à fournir « sur demande », à partir de la date d’attribution du contrat jusqu’au 31 mars 2023 (date d’expiration de leurs OC). Les 3 titulaires de COC ont reçu un énoncé des travaux (EDT) et ont été invités à soumettre des propositions et un échantillon de leur travail antérieur, ainsi que les curriculum vitæ des ressources avant le 8 juillet 2022.

57. Aucun des titulaires de COC sollicités n’a été informé qu’il faisait l’objet d’un processus concurrentiel secondaire.

58. ISDE n’a pas divulgué ses critères d’évaluation ni sa méthode de sélection, contrairement à ce qu’exige la politique. ISDE a évalué les 3 propositions et attribué 2 commandes subséquentes pour de futurs besoins en traduction, entre la date d’attribution du contrat et le 31 mars 2023 (date d’expiration de leurs OC).

Constatation – Question 2

59. ISDE a mené un processus d’approvisionnement concurrentiel en utilisant des critères non divulgués. En invitant 3 titulaires de COC à soumettre des propositions et en attribuant par la suite 2 commandes subséquentes, ISDE a lancé un processus concurrentiel, mais a enfreint les règles d’approvisionnement concurrentiel en omettant (a) d’informer les titulaires de COC qu’ils étaient dans un processus concurrentiel; et (b) de divulguer des critères d’évaluation ou une méthode de sélection.

Autres observations

60. Conformément au paragraphe 12(1) du Règlement, l’ombudsman de l’approvisionnement doit tenir compte de tous les facteurs liés au processus d’approvisionnement en question lors de l’examen d’une plainte.

61. Le BOA a cerné d’autres problèmes avec la DOC et les OC comme suit :

  1. ISDE a dépassé le nombre maximal d’OC à attribuer dans le cadre de cette DOC. Plus précisément, la DOC, à l’annexe A – Exigence (tableau 1), indique que le nombre maximal d’OC à attribuer est de 23 et que le nombre maximal d’OC pour la traduction de l’anglais vers le français est de 6. ISDE a confirmé au BOA que 31 OC ont été attribuées, dont 11 pour la traduction de l’anglais au français.

    Les limites des OC sont établies pour favoriser une répartition équitable et transparente du travail entre les titulaires de COC. Si le nombre réel d’OC avait été divulgué à l’avance aux fournisseurs potentiels, cela aurait pu influencer leurs décisions quant à l’opportunité et à la manière de structurer leurs soumissions. Une surveillance plus stricte est nécessaire pour garantir que les limites de la DOC sont divulguées de manière transparente et respectées.

  2. Un certain nombre d’erreurs administratives ont été détectées dans la documentation des DOC et des OC, notamment :
    • Une divergence dans la période de validité des OC : la page de couverture des 3 OC indique que leur période de validité s’étend du 1er juin 2022 au 31 mars 2027. Parallèlement, la section 4.1 de l’annexe B – Modalités de paiement des OC indique une période initiale de contrat allant du 1er juin 2022 au 31 mars 2023, et la section 4.2 énumère quatre périodes d’option d’un an. ISDE doit assurer la cohérence des informations fournies.
    • Les conditions figurant à la partie 6 – Clauses du contrat subséquent de la DOC diffèrent de celles des OC subséquentes : Dans un cas, les conditions générales d’un contrat de service incorporées par renvoi dans la section 6.1 de la DOC ne sont pas les mêmes que celles comprises dans les OC. Par exemple, la condition générale 33 de la DOC porte sur la divisibilité, alors que celle des offres à commandes porte sur des services de photographie. ISDE doit s’assurer que toutes les informations fournies dans la DOC, y compris les conditions, sont incluses de manière appropriée et précise dans les OC subséquentes afin d’éviter tout malentendu ou litige.

Conclusion

62. L’ombudsman de l’approvisionnement estime qu’ISDE :

Indemnisation

63. Afin de recommander le versement d’une indemnité au plaignant, le paragraphe 13(2) du Règlement exige ce qui suit :

« Si un appel d’offres a été lancé, le plaignant doit avoir soumissionné à l’égard du marché de l’État visé par la plainte, à moins qu’il n’ait pu le faire en raison des actions du ministère contractant. »

64. Étant donné qu’un processus concurrentiel a eu lieu et que le plaignant a présenté une offre, l’ombudsman peut recommander le versement d’une indemnité conformément au Règlement.

Recommandation

65. Sur la base des conclusions identifiées ci-dessus et conformément au paragraphe 13(1) (b) du Règlement, l’ombudsman de l’approvisionnement recommande le versement d’un montant de 1 473,94 $ à titre d’indemnité pour les coûts de préparation de la soumission en réponse aux 2 commandes subséquentes attribuées à la suite du processus d’appel d’offres.

66. De plus, l’ombudsman de l’approvisionnement recommande à ISDE ce qui suit :

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