Message de l'ombudsman de l'approvisionnement
J'ai le plaisir de présenter le rapport annuel du Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement (BOA). Ce rapport présente un résumé des activités entreprises par le BOA au cours de l'exercice 2013-2014.
Cette année, nous avons pu observer une nette augmentation du nombre de communications à mon bureau. En effet, nous avons reçu 501 communications en 2013-2014 par rapport à 369 au cours de l'exercice précédent. Cette augmentation de 36 p. cent est attribuable, en grande partie, à nos efforts soutenus pour informer les fournisseurs qui vendent des biens et des services au gouvernement fédéral que nous sommes là pour aider ceux qui éprouvent des difficultés.
Parallèlement à cette augmentation du volume des communications, nous avons constaté une augmentation du nombre de problèmes liés à l'approvisionnement qui nous ont été soumis. Nous devons nous attendre à cette augmentation, car un fournisseur qui communique avec le BOA soulève souvent plus d'un problème. Il n'est pas rare, par exemple, qu'un fournisseur communique avec nous pour discuter d'une soumission non retenue et, dans la même veine, soulever d'autres problèmes tels que la stratégie d'approvisionnement choisie par le ministère, la clarté d'un énoncé des travaux ou, peut-être, le refus du ministère de donner une explication claire des lacunes d'une soumission.
Dans la grande majorité des cas, les fournisseurs qui communiquent avec le BOA ne le font pas avec l'intention précise de déposer une plainte. La plupart d'entre eux cherchent simplement à obtenir des renseignements ou une explication d'un tiers impartial et neutre. Conformément avec le rôle d'un ombudsman, nous faisons de notre mieux pour aider ceux qui nous appellent, dont certains qui sont exaspérés. Notre objectif est de traiter chaque personne et les problèmes qu'elle soulève promptement et de manière personnalisée, tout en demeurant impartial et objectif. Ce qui ressort de nos interactions avec ces hommes et ces femmes d'affaires, ce ne sont pas nécessairement les renseignements que nous leur donnons ou l'explication du processus d'approvisionnement ou encore des règles de passation de contrat du gouvernement fédéral qui comptent. Ce qui compte c'est d'entendre les faits d'une source indépendante qui n'a aucun intérêt direct dans les problèmes soulevés. Nous avons constaté que, bien souvent, ce qui faisait une différence n'était pas ce qu'on leur disait, mais plutôt la personne qui le leur disait.
Comme je l'indique dans le corps du présent rapport, la vaste majorité des problèmes soulevés auprès de mon bureau sont des problèmes ayant déjà été signalés auparavant et qui continuent d'être une source de frustration pour les fournisseurs. Mentionnons notamment des problèmes récurrents, comme le temps et le coût de préparation des soumissions qui se soldent tout simplement par un rejet de celles-ci pour des raisons administratives apparemment sans importance, le temps et la difficulté associés à l'obtention d'attestations de sécurité ou la perception tenace que les énoncés des travaux sont établis de façon partiale. Parmi ces problèmes, on en compte deux qui ont déjà été quelque fois soulevés auparavant, mais qui l'ont été à plusieurs reprises au cours du présent exercice. Il s'agit de la condition imposée aux fournisseurs de souscrire une assurance de responsabilité civile dans le cadre d'un contrat et de la perception qu'il existe un nombre croissant d'appels d'offres à l'échelle nationale qui exigent des fournisseurs qu'ils possèdent les capacités voulues à l'échelle du pays.
Nous avons eu connaissance de ce problème d'assurance de responsabilité civile lors d'une de nos premières assemblées publiques de l'année, à Ottawa. Ce même problème a été mentionné tout au long de l'année à l'occasion d'autres événements de sensibilisation, un peu partout au pays. Les fournisseurs ont le sentiment que les ministères exigent implicitement et arbitrairement des entreprises qu'elles souscrivent une assurance, que le besoin soit justifié ou non. En vertu de la politique gouvernementale, les ministères doivent évaluer les risques associés à chaque contrat et prendre une décision éclairée quant à la nécessité, selon le risque, d'exiger du fournisseur qu'il souscrive une assurance de responsabilité civile. Cette politique prévoit que les ministères fédéraux incluent, à leur discrétion, dans les contrats des clauses de responsabilité, s'il est approprié et justifié de le faire, notamment en ce qui a trait aux contrats de services hautement spécialisés, afin de protéger la santé, la sécurité et le bien-être économique de la population canadienne. Dans l'orientation de cette politique, on reconnaît que les demandes excessives de protection de responsabilité risquent d'entraîner une augmentation des coûts pour les entrepreneurs et, par conséquent, les amener à augmenter les prix ou à s'abstenir de faire affaire avec l'État. Les ministères ont donc le choix de « ne rien dire » au sujet de cette exigence de souscription d'assurance. Lorsqu'un ministère décide de garder le silence, les fournisseurs peuvent, à leur discrétion, souscrire ou non une assurance de responsabilité civile. Dans ces cas, ce sont les principes du droit civil ou de common law qui s'appliquent. Autrement dit, tant le gouvernement que les fournisseurs doivent assumer respectivement les pertes et les dommages dont ils sont responsables.
Les entreprises qui fournissent des services tels que la recherche, l'édition et la formation expriment leurs préoccupations quant aux dépenses coûteuses et excessives qu'entraîne, selon elles, l'inclusion inconsidérée, par les ministères, de l'exigence de souscrire une assurance de responsabilité civile lorsque le type de travail demandé n'entraîne peu ou pas de responsabilité éventuelle.
L'autre problème est un sentiment exprimé par les fournisseurs, surtout ceux qui sont à l'extérieur de la région de la capitale nationale, selon lequel ils se sentent « évincés » en raison du nombre croissant d'appels d'offres à l'échelle nationale qui exigent d'eux qu'ils possèdent les capacités voulues à l'échelle du pays. Les représentants ministériels font remarquer qu'en période de resserrement budgétaire il est plus économique d'établir et de gérer des contrats uniques à l'échelle nationale plutôt que de nombreux petits contrats à l'échelle régionale. Même si cette pratique relève du bon sens économique en période d'austérité budgétaire, les petites entreprises, dont un bon nombre ont pendant des années fourni des biens ou des services dans les collectivités un peu partout au pays, se sentent de plus en plus défavorisées. Certaines d'entre elles nous ont affirmé qu'elles n'étaient plus en mesure de participer à des appels d'offres concurrentiels pour des contrats fédéraux. Une fournisseuse d'Edmonton a mentionné un appel d'offres qui exigeait des entreprises qu'elles aient des bureaux partout au pays. Elle a décrit cette exigence comme un obstacle à la poursuite des affaires avec des ministères fédéraux avec lesquels elle fait affaire depuis des années. Un fournisseur de Kingston a pour sa part affirmé de façon catégorique que « ces gros contrats désavantagent les petites entreprises qui n'ont pas les moyens de faire face à la concurrence [traduction] ». La plupart des femmes et des hommes d'affaires voient la situation dans son ensemble. Néanmoins, on constate une frustration engendrée par ce qui semble être une incohérence : d'une part, les ministères et organismes semblent passer fermement à un approvisionnement national qui, même si l'objectif est d'accroître la rentabilité, prive les fournisseurs locaux de la possibilité de soumissionner des marchés traditionnels; d'autre part, le gouvernement souhaite que les petites et moyennes entreprises de toutes les régions du pays soient dynamiques et en bonne santé financière.
Dans le rapport du dernier exercice, j'ai mentionné que mon bureau continuait à donner suite aux recommandations de deux études, soit une évaluation de notre programme de sensibilisation ainsi qu'une évaluation formative indépendante effectuée sur l'efficacité du BOA.
Comme j'y ai fait allusion plus tôt, d'importants progrès ont été réalisés pour renforcer le programme de sensibilisation afin de joindre un plus grand nombre de fournisseurs pour les informer des services que nous offrons. Mentionnons notamment les séances de discussion ouverte avec les fournisseurs à des endroits stratégiques, un peu partout au pays, des exposés devant les chambres de commerce, des réunions avec des députés et leur personnel de circonscription, la participation à des activités organisées par des réseaux d'entreprises provinciaux et des organisations de développement économique municipales, l'établissement d'une présence sur les médias sociaux et la création de nouveaux moyens pour permettre aux fournisseurs de nous joindre. À en juger par l'augmentation du nombre de communications au BOA, le programme semble fonctionner. Que ce soit par téléphone, par lettre, par courriel, sur le site Web ou en personne lors de l'une de nos activités de sensibilisation, plus d'un millier de fournisseurs ont pris le temps, cette année, de nous faire part des problèmes et des expériences qu'ils ont vécus en vendant des biens et des services au gouvernement fédéral.
Un autre élément de cette approche ciblée pour informer les fournisseurs de l'existence de mon bureau était notamment de mentionner ce dernier comme mécanisme de recours dans les documents d'approvisionnement des ministères et des organismes. Afin de promouvoir cette initiative, la ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a écrit, en juin 2013, à ses collègues du Cabinet pour les inciter à collaborer avec leurs administrateurs généraux pour inclure des renseignements liés au Bureau dans les principaux documents d'approvisionnement (à savoir les appels d'offres, les contrats subséquents et les lettres de refus visant à informer les fournisseurs qu'ils n'ont pas été retenus dans le cadre de l'appel d'offres pour un contrat) publiés par les ministères et organismes fédéraux relevant de leurs portefeuilles. Il est important de se rappeler qu'en créant le poste d'ombudsman de l'approvisionnement, le gouvernement du Canada a doté les entreprises canadiennes fournissant des biens et des services aux ministères et aux organismes fédéraux, une autorité impartiale – indépendante des organisations qui effectuent des achats – pour recevoir et résoudre les problèmes, et examiner les plaintes. Par conséquent, les fournisseurs faisant affaire avec le gouvernement fédéral ont le droit de savoir qu'il existe une autorité impartiale, indépendante du ministère ou de l'organisme avec lequel ils font affaire, afin qu'ils puissent prendre une décision éclairée sur la façon de faire entendre leurs problèmes. Comme je l'ai mentionné plus tôt, faire en sorte que les fournisseurs connaissent le Bureau et qu'ils aient l'occasion de prendre la décision de s'y adresser a donné de l'élan à nos efforts de sensibilisation soutenus et a été un des facteurs clés de cette initiative particulière.
En ce qui concerne les deux autres recommandations de l'évaluation formative, l'une portait sur le mandat de mon bureau et l'autre sur notre service de règlement des différends. Je commencerai d'abord par la recommandation sur le mandat.
Après avoir déterminé qu'un « nombre important de fournisseurs » avaient mentionné que le mandat du Bureau devrait être étendu pour tenir compte des besoins des petites et des moyennes entreprises, les évaluateurs nous ont recommandé d'analyser d'une part les avantages et inconvénients d'une expansion de notre mandat aux plaintes d'une valeur monétaire supérieure et, d'autre part, les mesures visant à exiger des ministères qu'ils donnent suite aux recommandations formulées lors de nos examens. Ces analyses sont terminées. L'évaluation indépendante n'a trouvé aucun motif valable de modifier les seuils monétaires qui sous-tendent le mandat de l'ombudsman de l'approvisionnement. L'évaluation conclue que la justification de la politique initiale, à savoir que la fonction d'ombudsman comblait une lacune du système de règlement des différends dans le cadre des contrats fédéraux, demeurait impérieuse. La seconde évaluation n'a constaté aucune raison sérieuse de rendre obligatoire l'application des recommandations de l'ombudsman de l'approvisionnement, car un tel pouvoir serait incompatible avec le statut d'un ombudsman.
Lors de l'évaluation formative, les évaluateurs ont relevé un problème au sein de la collectivité des fournisseurs, selon lequel les ministères pouvaient refuser de participer au service de règlement des différends de mon bureau demandé par un fournisseur. Ils ont recommandé que nous déterminions si la participation pouvait être rendue obligatoire. Une évaluation indépendante a conclu que la participation volontaire à notre service de médiation était conforme aux principes du processus d'évaluation indépendant.
Dans le prochain exercice, je suis déterminé à poursuivre nos efforts de sensibilisation à l'égard de nos services, tant auprès des fournisseurs que des collectivités de l'approvisionnement fédérales. Nous accorderons une importance particulière à la promotion de notre service de règlement des différends qui est susceptible d'aider grandement les fournisseurs et ministères, mais qui demeure nettement inconnu et sous-utilisé. Puisqu'il est raisonnable de s'attendre à ce que ces efforts se soldent par une augmentation continue du nombre de fournisseurs communiquant avec le Bureau, je suis également déterminé à apporter les modifications organisationnelles nécessaires pour nous permettre de maintenir un niveau de réponses exemplaire aux fournisseurs et aux représentants gouvernementaux qui s'adressent à nous pour obtenir de l'aide.
Frank Brunetta
Ombudsman de l'approvisionnement
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