Message de l'ombudsman de l'approvisionnement par intérim : Rapport annuel 2016-2017 Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement
Je suis honoré de présenter le rapport annuel 2016-2017 du Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement. Nous en avons changé le format pour en faciliter la lecture à l'écran (sur ordinateur, tablette ou téléphone intelligent). Nous en avons aussi imprimé un minimum d'exemplaires pour diminuer notre incidence sur l'environnement.
« Selon mon expérience en 2016-2017, les organismes fédéraux sont de plus en plus disposés à nous laisser intervenir dans ce domaine; une attitude qui, je l'espère, se maintiendra et prendra de l'ampleur dans les années à venir. »
Ce rapport met en lumière les travaux exécutés par le Bureau entre le 1er avril 2016 et le 31 mars 2017 (exercice 2016-2017). Il résume également les rapports produits et cite des exemples de la façon dont nous avons voulu aider tous ceux et celles qui nous ont contacté. Je suis particulièrement fier du travail que nous avons accompli, d'avoir répondu rapidement et significativement aux questions qui nous ont été posées et d'avoir aidé les fournisseurs canadiens et les organismes fédéraux à régler des différends. Notre expérience démontre qu'il est profitable pour les fournisseurs et les organismes fédéraux de régler les différends de cette manière. Cela permet d'éliminer le temps et l'énergie associés à l'aggravation du problème au sein des organismes, de prévenir les litiges coûteux en argent et en temps et de permettre aux deux camps de reprendre les activités normales. On trouvera en page 21 du présent rapport des exemples d'aide apportée par notre bureau sur ce plan avant que ne s'engagent des démarches officielles de règlement des conflits. Ce sont là des cas où des organismes fédéraux sont entrés en contact avec le Bureau, ce qui nous a permis de faciliter le règlement rapidement. Selon mon expérience en 2016-2017, les organismes fédéraux sont de plus en plus disposés à nous laisser intervenir dans ce domaine; une attitude qui, je l'espère, se maintiendra et prendra de l'ampleur dans les années à venir.
Par ailleurs, le présent document expose les vues et les réactions des fournisseurs canadiens et des représentants fédéraux qui ont pu communiquer avec nous directement ou par l'intermédiaire de nos nombreuses activités de sensibilisation. Si je regarde ce qui s'est passé en 2016-2017, et notamment les discussions que nous avons eues avec les deux camps, trois aspects ressortent à mes yeux : le manque de capacités fédérales en matière d'approvisionnement, les offres à commandes et les défis que représente une simplification de l'approvisionnement.
Capacités fédérales en matière d'approvisionnement
J'entends parler du premier aspect, celui de la carence des capacités fédérales en matière d'approvisionnement, depuis mon arrivée au Bureau en 2012. J'ai pu constater au cours de la dernière année que les fournisseurs et les représentants fédéraux ont pu exprimer avec plus de précision les répercussions qu'ont un manque de capacités en cette matière pour l'ensemble des organisations fédérales et pour les fournisseurs qui désirent faire affaire avec le gouvernement.
Cette question des capacités pique la curiosité, puisque, contrairement à bien d'autres sujets dans le domaine de l'approvisionnement, elle semble faire consensus parmi les fournisseurs, les spécialistes et les gestionnaires de programme. Dans la dernière année, il m'est apparu par des discussions avec ces groupes qu'un grand nombre (sinon la majorité) des organismes fédéraux n'avaient pas suffisamment de préposés aux achats ou disposaient d'un personnel n'ayant ni l'expérience ni les connaissances voulues pour prendre en charge la quantité et la complexité des approvisionnements fédéraux en toute équité, ouverture et transparence. Cela provoque des retards à divers étapes du processus et fait craindre qu'on doive de plus en plus s'appuyer sur des non-spécialistes pour réaliser certains approvisionnements. Ajoutons que les fournisseurs doivent de plus en plus poser des questions ou demander des éclaircissements puisqu'ils traitent avec des employés qui n'ont pas toujours une connaissance suffisante de leur domaine.
Le manque de capacités occasionne un maraudage intense à l'endroit des spécialistes expérimentés et compétents par les organismes fédéraux. La situation pourrait même empirer, puisque les données indiquent que la communauté des approvisionnements présente un des taux les plus élevés d'admissibilité de son personnel à la retraite dans un horizon de cinq ans. Sans des efforts concertés de la part de tous les organismes fédéraux et, surtout, sans une coordination des mesures de recrutement et de perfectionnement des spécialistes de l'approvisionnement à l'échelle des organismes, les problèmes de capacité et les effets qui y sont associés ne peuvent que s'alourdir.
Offres à commandes
Le deuxième enjeu est celui des offres à commandes. C'est une question que le Bureau a soulevée à maintes reprises. Bien qu'un grand nombre des sujets d'inquiétude déjà exposés sont toujours d'actualité, je m'arrêterai à un aspect en particulier, à savoir l'absence de garantie de revenu pour les fournisseurs même après qu'ils se soient qualifiés aux fins de ces instruments d'approvisionnement.
Les offres à commandes sont des outils en fonction desquels les fournisseurs doivent se qualifier de manière à pouvoir approvisionner les organismes fédéraux en biens et services « au besoin ». Quand un bien ou un service est demandé (commandé) par un organisme fédéral, l'opération en question (la commande) devient un contrat. Les offres à commandes sont là pour faciliter les achats de biens et services fréquemment acquis. Les avantages attendus de ces instruments sont qu'ils doivent réduire la paperasserie, abaisser le coût des biens et services, accélérer les achats et diminuer le nombre d'appels d'offres.
Ce sont des avantages qui, lorsqu'ils se matérialisent, vont aux organismes fédéraux et aux fournisseurs, mais le risque est plus grand pour ces derniers. Les fournisseurs doivent investir du temps et de l'énergie pour produire des propositions et ainsi se qualifier aux fins de ces instruments. C'est là un aspect normal de tout approvisionnement – les fournisseurs devant soumettre des propositions dans le cadre de tout appel d'offres sans être sûrs de se voir adjuger le contrat – , mais il faut savoir que décrocher une offre à commandes n'est pas décrocher un contrat, les deux n'étant pas à confondre, une offre à commandes n'est pas un contrat. Ainsi, les fournisseurs admis à une offre à commandes n'ont nullement la certitude d'obtenir des contrats. Il y a à cela deux raisons : 1) sauf pour les produits de base obligatoires, rien n'oblige en réalité les organismes fédéraux à honorer les offres à commandes qu'ils ont établies; 2) si des organismes optent pour des offres à commandes, rien ne garantit que tel ou tel fournisseur obtiendra un contrat. C'est ici que le bât blesse : s'il veut un contrat, un fournisseur doit être prêt à fournir les biens ou les services en question dans un délai très court; j'ai vu beaucoup d'offres à commandes assorties de délais d'exécution de 72 heures. Cela signifie que les fournisseurs doivent investir dans des stocks de marchandises ou s'assurer d'avoir accès à des ressources de qualité (dans le cas des services) pour une exécution rapide, et ce, sans la garantie d'obtenir des contrats ni de toucher des revenus.
De plus, des fournisseurs m'ont souvent dit qu'ils doivent se faire concurrence et se qualifier pour des instruments multiples et aussi pour plusieurs organismes fédéraux dans ce qui demeure essentiellement la fourniture de biens ou de services semblables. Ces fournisseurs sont, plus souvent qu'à leur tour, de petites et moyennes entreprises soucieuses de décrocher des contrats auprès des organismes fédéraux, d'où leurs efforts pour être admis au plus grand nombre possible d'instruments d'approvisionnement. Et qu'advient-il lorsqu'ils sont qualifiés? Ils attendent en espérant recevoir des commandes et en espérant également qu'un organisme fédéral ne choisira pas d'obtenir les biens ou les services qu'il souhaite par un outil autre que l'offre à commandes à laquelle ils sont admis.
Des solutions sont possibles à certains de ces problèmes – par exemple, en créant à l'échelle de l'administration publique un dépôt centralisé des offres à commandes des organismes fédéraux, ce qui pourrait réduire le double emploi entre organismes. Plus fondamental encore, il est nécessaire d'avoir une recherche et une analyse permettant de déterminer si les avantages attendus des offres à commandes se matérialisent vraiment. Si tel n'est pas le cas, les organismes fédéraux doivent se demander avec soin s'ils ne font pas courir de plus grands risques aux fournisseurs canadiens en optant pour de tels instruments d'approvisionnement.
Défis de la simplification de l'approvisionnement fédéral
Au cours de la dernière année, j'ai eu connaissance d'un certain nombre d'initiatives envisagées par les organismes fédéraux en vue de moderniser et de simplifier les achats de l'administration fédérale. Comme ils s'engagent dans de telles initiatives, j'ose penser qu'ils garderont à l'esprit que les achats doivent non seulement être simplifiés, mais aussi être exhaustifs et complets. Il faut s'assurer que les fournisseurs qui soumissionnent au palier fédéral comprennent bien ce qu'on attend d'eux tant pour la soumission à produire que pour les travaux devant suivre l'adjudication du contrat. Pour ce faire, il faut que les documents d'appel d'offres élaborés par les organismes fédéraux soient complets et intelligibles pour la plupart des Canadiens ou, à tout le moins, pour les fournisseurs d'une industrie donnée.
Une doléance courante des fournisseurs canadiens, et des petites et moyennes entreprises en particulier, est que le processus d'approvisionnement fédéral est complexe. Beaucoup reprochent aux appels d'offres de l'administration fédérale de compter fréquemment des douzaines, voire des centaines de pages, par exemple. Il arrive même que des fournisseurs ne se rendent pas compte que les documents d'appel d'offres n'énoncent pas en réalité les instructions ou les conditions d'application générale, lesquelles sont plutôt incorporées à cette documentation par renvoi. Cela veut dire que les documents sont non seulement beaucoup plus longs, mais aussi que les fournisseurs ont à consulter des sites Web pour constater la totalité de ce qu'ils ont à respecter au moment de soumissionner et, s'ils sont retenus, au moment de signer un contrat. Chez les fournisseurs à qui j'ai parlé, nombreux sont ceux qui ont décrit la teneur des appels d'offres et des contrats comme légaliste et parfois même incompréhensible. Souvent, ils diront que les clauses ou les références sont écrites par des avocats pour des avocats.
De leur côté, les représentants fédéraux diront que les documents sont très détaillés, parce qu'ils ont à expliciter clairement et entièrement les détails du processus d'approvisionnement et le contrat qui en résulte. C'est là un principe établi par la justice et la jurisprudence, et renforcé dans les examens réalisés par notre bureau. D'autre part, des organismes fédéraux m'ont dit officieusement qu'ils ne désiraient pas que les documents des appels d'offres et des marchés publics soient trop complexes, mais qu'ils n'avaient guère le choix s'ils entendaient respecter ce principe et ainsi protéger leur organisation face aux défis reliés à l'approvisionnement.
Le défi est donc de concevoir des documents d'approvisionnement qui soient assez clairs et simples pour que les fournisseurs d'une industrie donnée les utilisent, tout en restant suffisamment détaillés et précis. Ce juste milieu ne sera pas facile à atteindre, mais comme les Canadiens ont été assez ingénieux, entre autres, pour inventer la souffleuse à neige, découvrir l'insuline, construire le bras canadien et créer la poutine, on ne s'étonnera pas que les fournisseurs s'attendent à ce que leur gouvernement trouve des moyens de simplifier les approvisionnements fédéraux.
L'avenir
En 2017-2018, le Bureau continuera à prêter l'oreille à tous ceux qui s'intéressent aux approvisionnements fédéraux. Nous continuerons également à aider les fournisseurs et les organismes fédéraux canadiens à trouver le plus rapidement et le plus librement possible des solutions à leurs questions, préoccupations et différends. Après tout, le mot d'ordre de notre bureau est que nous sommes là pour aider. Nous espérons que les fournisseurs et les organismes fédéraux nous donneront de plus en plus la chance de le faire.
Lorenzo Ieraci
Ombudsman de l'approvisionnement par intérim
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